• Le ballon blanc - un film de Jafar Panahi (1995)Après "Le cercle" sorti en 2000 "Le ballon blanc" est le second film du réalisateur iranien Jafar Panahi que j'ai regardé grâce aux samedis du cinéma iranien organisé par l'association cinéma(s) d'Iran au cinéma Le nouvel Odéon à Paris, un samedi matin par mois.

    La projection s'est déroulée le 21 mars, jour du nouvel an persan (1394) afin de le faire coïncider avec l'intrigue du film qui se déroule 1h30 avant un nouvel an. Une petite fille avec l'aide de son frère aîné arrive à soutirer de l'argent à sa mère afin d'acheter un gros poisson rouge dans une boutique, le poisson rouge étant un des symboles de la fête du nouvel an persan. Malheureusement tout ne se passe pas comme elle le souhaiterait. Elle se fait prendre son billet par un charmeur de serpents mais arrive tout de même à le récupérer puis le billet tombe sous une grille d'un magasin. Avec son frère, elle cherchera coûte que coûte à prendre l'argent qui est tombé dans un endroit difficile d'accès.

    Jafar Panahi donne les deux rôles principaux à deux enfants : il est plus facile de faire parler des enfants dans un pays, l'Iran, où la censure est importante. Dans le film, on voit Téhéran et ses rues, ses habitants (essentiellement des hommes qui occupent l'espace public), quelques boutiques. La petite fille a une forte personnalité, elle tient tête à sa mère, oblige le charmeur de serpents à rendre son billet, négocie avecLe ballon blanc - un film de Jafar Panahi (1995) le vendeur de poissons. Une petite fille qui montre que les femmes iraniennes veulent être libre et se défaire de leurs chaines imposées par lune République Islamiste. Comme je le disais, les hommes sont omniprésents dans la rue, pouvant s'arrêter, regarder ce qui les entoure tandis que le peu de femmes présentes sont obligées de marcher : il n'est pas question de flâner. Cet état de fait est très représentatif de la la place accordée aux femmes dans un pays qui considèrent les femmes inférieures aux hommes. On ne voit pas le père des deux enfants, on l'entend juste donner des ordres. Le fils obéit et dans la dernière scène, le garçon ne pense pas à remercier l'adolescent afghan qui leur a rendu service, comme pour se venger de la dureté de son père et certainement aussi parce que les immigrés afghan sont assez mal perçus en Iran (cherchez le bouc-émissaire, c'est malheureusement partout le même problème). 

    'Le ballon blanc" n'est pas à proprement parler un film politique mais il glisse tout du long du film sur le social, relatant des événements se déroulant dans la rue, permettant de mieux appréhender la vie à Téhéran par le biais de deux enfants déterminés.

    Le ballon blanc - un film de Jafar Panahi (1995)La mère que l'on voit au début du film est l'actrice Fereshteh Sadre Orafaiy qui joue également dans "Le cercle". Aïda Mohammadkhani joue la petite fille de superbe façon, avec détermination et beaucoup de caractère, deux année plus tard elle jouera dans "Le miroir", film du même réalisateur. Elle a maintenant 26 ans.

    J'en parlais dans la chronique de "Le cercle", Jafar Panahi a l'interdiction de faire son métier pendant 20 ans mais arrive tout de même à sortir des films en détournant la loi. Ses idées progressistes ne plaisent pas à la censure, en l’occurrence le gouvernement iranien qui aimerait bien le voir partir du pays. Son prochain film "Taxi Téhéran" (regardez la bande-annonce) sortira en France le 15 avril. Je vous en parlerai donc prochainement. En attendant, n'hésitez pas à regarder ce beau film qu'est "Le ballon blanc".

    Avec Aïda Mohammadkhani, Fereshteh Sadre Orafaiy, Mohsen Kafili, Mohammad Shahani, Mohammed Bakhtiar, etc.

    Le ballon blanc - un film de Jafar Panahi (1995)

     


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  • Sortie en salle le 4 mars 2015

    Le cercle - un film de Stefan Haupt (2014)Zurich, 1958. Alors que l'homosexualité est encore condamnée dans de nombreux pays d'Europe, Ernst et Röbi se rencontrent par l'intermédiaire du Cercle, une organisation suisse clandestine, pionnière de l'émancipation homosexuelle. Alors que les deux hommes luttent pour leur amour, ils vivent l'apogée et le déclin du Club, éditeur d'une revue homosexuelle trilingue, la seule alors autorisée dans le monde.

    Prix du Public et Treddy Award à la dernière Berlinade, le nouveau film du réalisateur Stefan Haupt (Gaudi - Le mystère de la Sagrada Familia) met en lumière un symbole de la libération sexuelle, à travers une histoire d'amour universelle.

    Le film relate l'histoire d'Ernst Ostertag et Röbi Rapp, deux jeunes homosexuels qui se rencontrent lors d'une soirée organisée par le Cercle. Le premier est professeur encore non diplômé dans une école de filles. Il est issu d'une famille aisée et intellectuelle qui rejette l'homosexualité tandis que le second, coiffeur, vient d'une famille plus modeste et ouverte à l'homosexualité. Tous les deux vont tomber amoureux l'un de l'autre et vont vivre une histoire d'amour toujours d'actualité en 2014, date de la réalisation du film, soit plus de 55 ans de vie commune. Ils seront le premier couple homosexuel suisse à se marier en 2003. A travers le film et au-delà de leur histoire, nous vivront la vie du Cercle, une organisation de Zurich dans laquelle les deux protagonistes sont investis. L'association est un cercle d'homosexuels organisant des soirées et une revue trilingue (allemand, français, anglais). A l'inverse de l'Allemagne (pays voisin) à la fin des années 50, la Suisse n'interdit pas les relations homosexuelles mais l'intolérance et les discriminations faites aux homosexuels sont monnaie courante, notamment la Police qui n'hésite pas à faire des arrestations arbitraires sous de faux prétexte. Pas de prison donc mais il vaut mieux vivre ses préférences sexuelles cachées, entre tabou et homophobie. 

    Le cercle - un film de Stefan Haupt (2014)

    Des séquences documentaires sont introduites dans le film lorsque Ernst et Röbi témoignent en 2014 mais elles laissent rapidement place à la fiction (mais une fiction réelle puisqu'autobiographique !) avec les acteurs. Ernst et Röbi ont beaucoup contribué au film, en apportant leur indispensable vécu et celui du Cercle, une organisation qui a permis à de nombreux homosexuels de se regrouper, d'échanger, de se lire et de lutter pour les droits des homosexuels. 

    Après "Pride" sorti en 2014, "Le cercle" est un nouveau film relatant l'histoire du milieu homosexuel et de ses luttes dans un pays et une période donnés, un film politique en quelque sorte mais réalisé de manière à être accessible à tout-e-s. Une des personnes du Cercle explique à Ernst que le mariage pour les homosexuel, c'est son communisme à lui et qu'il veut se battre pour l'obtenir.

    Le cercle étant réservé uniquement aux hommes homosexuels, nous n'aurons aucune information concernant le statut et la lutte des lesbiennes, ce qui est dommage. Une invisibilité des lesbiennes assez courante...

    Un film intéressant par son côté historique, en l'occurrence le milieu homosexuel (hommes) de Zurich à la fin des années 50, courant 60, par le biais d'une organisation, le Cercle. Il retrace les luttes malgré un aspect sommaire, le tout autour d'une (véritable) histoire d'amour. Un film à regarder, à faire découvrir et à diffuser dans les écoles.

    Le cercle - un film de Stefan Haupt (2014)

    Bref historique du Cercle :

    (dossier de presse)

    L'organisation "Le cercle", qui fut fondée dans les années 30, est née du mouvement gay du début du 20ème siècle. Comme elle fut la seule organisation d'entraide aux homosexuels qui survécut au nazisme en Europe, elle devint un modèle pour les organisations similaires dans de nombreux pays. Le fondateur était Rolf - un pseudonyme pour le célèbre acteur Karl Meier. Son moyen de communication le plus important fut la revue trilingue baptisée Des Kreis/Le Cercle/The Circle.

    Outre des histoires, des poèmes et des photos, le magazine publiait également des articles sur les activités des groupes homosexuels partout dans le monde - et contribua ainsi à l'échange international d'idées. Rolf était en contact avec des groupes d'homosexuels aux Pays-Bas, en Scandinavie, en Allemagne, en France et aux Etats-Unis. Parmi les abonnés du magazine, il y avait de nombreuses personnalités importantes.

    A partir de 1948, le Cercle loua un pub à Zurich (dans le bâtiment qui est maintenant le théâtre Neumark), un club dans lequel les "homophiles" de toute la Suisse pouvaient se rencontrer, échanger des idées et apprendre à se connaître. Le Cercle réunissait tous ceux qui luttaient pour les droits des homosexuels - non seulement d'un point de vue juridique, mais - plus important encore - d'un point de vue scientifique et culturel. Dans le même temps, le club était devenu un des rares havres de paix pour les gays. Tout au long des années 50, ses immenses bals costumés pouvaient réunir régulièrement jusqu'à 800 hommes venus de toute l'Europe. Mais à partir de 1959, à Zurich, la répression sociale commença à grandir, notamment due à plusieurs meurtres commis dans le milieu de la prostitution masculine (le "Stricher-Milieu"). La police de Zurich établit des fichiers d'homosexuels et des raids fréquents eurent lieu. Les homosexuels étaient chassés, interrogés et maltraités.

    Le cercle - un film de Stefan Haupt (2014)

    Au moment même où émergea cette répression croissante, le Cercle connut un changement structurel. Rolf, fondateur et figure paternelle de l'organisation, avait jusqu'alors toujours soutenu un mode d'action modéré, basé sur le compromis, et était constamment à la recherche d'accords entre l'organisation et les autorités. Mais cette philosophie commençait à contraster avec l'état d'esprit des membres les plus jeunes qui avaient rejoint le Cercle.

    En raison d'une loi adoptée par le Conseil Municipal en 1960 qui interdit la danse entre personnes de même sexe sur les terrains municipaux, le Cercle perdit l'une de ses plus importantes sources de revenus : les grands bals costumés. En 1961, le local du Cercle dut fermer ses portes. Ajoutés à cela, les désaccords internes finirent par conduire à l'arrêt de la revue, et l'ensemble de l'organisation fut dissoute en 1967. Les émeutes de 1968 détournèrent l'attention des autorités - la police ayant "d'autres chats à fouetter". Et la répression politique finit par diminuer. Grâce au travail de pionnière de cette organisation originaire de Zurich, de nombreuses autres organisations purent voir le jour, qui commencèrent à publier leurs propres revues et contribuèrent à faire avancer les droits.

     

    Avec Matthias Hungerbühler, Sven Schelker, Anatole Taubman, Marianne Sägebrecht, Antoine Monot, Jr., Peter Jecklin...

    Bande annonce :

     


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  • Sortie en salle le 11 février 2015

    Mon fils - un film d'Eran Riklis (2014)Lyad vit dans une ville arabe en Israël/Palestine avec ses parents et ses deux frères. A l'école il est très bon élève, surtout en mathématiques. Il réussit à 16 ans à intégrer un prestigieux lycéen à Jérusalem où il y vivra en internat. Là-bas, il y fera la connaissance d'Aisha dont il tombera amoureux. Malheureusement les parents de cette dernière sont racistes et refusent que leur fille est une relation amoureuse avec un arabe. Lyad est le seul arabe dans le lycée et ses camarades de classe lui feront bien remarquer. Mais peu à peu il se fera accepter sans arriver à avoir de réelles amitiés.

    Lyad est bénévole chez Yonathan, un jeune homme de son âge en fauteuil roulant atteint d'une maladie dégénérative. Yonathan est fan de musique et souffre de ne plus pouvoir jouer de la guitare à cause de ses mains qui n'ont plus la même souplesse qu'auparavant dû à sa maladie. Tous les deux vont se lier d'amitié et permettent à l'un et à l'autre de se sentir moins seuls et vont s'épauler mutuellement. Edna, la mère de Yonathan qui a perdu son mari quelques années plus tôt à cause de la même maladie est soulagée d'avoir quelqu'un qui puisse laMon fils - un film d'Eran Riklis (2014) seconder, elle qui a tant peur de perdre pour la seconde fois un être tant aimé.

    Dans sa vie à Jérusalem, Lyad va découvrir l'amour avec Aisha, une forte amitié avec Yonathan et une seconde famille d'adoption avec Yonathan et sa mère. Mais il découvrira également le racisme avec les parents d'Aisha, avec la police qui le considère comme un potentiel terroriste, le rejet des débuts au lycée parce qu'il éprouvait certaines difficultés à s'exprimer en  hébreu par manque de pratique ou parce qu'il s'habillait différemment de ses camarades. Et tout simplement parce qu'il fait partie en Israël d'une minorité et que comme toutes les minorités le rejet est souvent de mise par la majorité. Sans parler, bien entendu, du conflit palestino-israélien. Dans sa jeunesse, le père de Lyad était militant communiste pour la création d'un état palestinien. A cause de son engagement, il a fait 2 ans de prison et a dû arrêter ses études universitaires. C'est son père qui a poussé Lyad à faire des études afin qu'il ne soit pas comme lui un ouvrier non qualifié et qu'il puisse être mieux accepté dans cette société à dominance juive. 

    Mon fils - un film d'Eran Riklis (2014)

    Le scénariste du film Sayed Kashua, également journaliste, critique de télévision et écrivain, s'est inspiré de ses livres "Les Arabes dansent aussi" (livre autobiographique trouvé il y a quelques mois dans une bouquinerie, j'ai hâte de le lire !) et "La deuxième personne". Dans le film on sent une réflexion sur la place des arabes israéliens dans une société qui ne veut pas d'eux et dans ces conditions, comment se faire accepter ? Mais la réflexion se tourne également vers l'amitié, l'amour, la maladie, la famille, les différences.

    Mon fils - un film d'Eran Riklis (2014)Eran Riklis a réalisé un film émouvant sur différents aspects (le rejet, la maladie, la mort) avec des moments de tendresses et d'autres au contraires assez durs mais tout en restant accessible. Tawfeek Barhom (Lyad), Yaël Abecassis (Edna) , Michael Moshonov (Yonathan), Lætitia Eïdo (la mère de Lyad) jouent d'une façon remarquable mais les autres comédiens et comédiennes ne sont pas non plus très loin derrière. Je ne m'attendais pas à voir un film aussi beau et émouvant en me rendant au cinéma.

    Avec Tawfeek Barhom (Lyad), Yaël Abecassis (Edna) , Michael Moshonov (Yonathan), Lætitia Eïdo (Fahima), Ali Suliman (Salah), Marlene Bajali (Aisha)...

    Mon fils - un film d'Eran Riklis (2014)

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  • Sortie en salle le 14 janvier 2015

    A girl walks home alone at night - un film d'Ana Lily Amirpour (2014)Dans la ville de Bad City en Iran une jeune femme marche la nuit. Sous son tchador se cache une vampire qui tue les hommes malsains. Sur sa route, elle fait la connaissance d'Arash, un jeune homme solitaire fou de sa voiture et aux allures de James Dean. Il vit avec son père malade, drogué et leur chat.

    Tous les deux ont comme point commun la solitude, la musique pop, rock et une envie irrésistible de fuir cette ville de mort (les cadavres sont entassés les uns sur les autres dans la ville) et de solitude. 

    Premier long métrage pour Ana Lily Amirpour, états-unienne d'origine iranienne qui réalise avec "A girl walks home alone at night" un film en noir et blanc atypique et d'un fabuleux esthétisme centré sur le noir, le côté sombre. Les scènes sont filmées de nuit dans la ville imaginaire de Bad City (tout un programme !). Rien que pour les magnifiques prises de vue et la photographie superbe "A girl walks home alone at night" vaut le déplacement.

    A girl walks home alone at night - un film d'Ana Lily Amirpour (2014)

    L'action en elle-même est très souvent décalée, proposant toute une série de suggestions pour que notre cerveau essaie de comprendre où veut en venir la réalisatrice. On ressent une ville morte, à l'agonie, un aspect basé sur la face obscure d'une ville sans future à moins que nous soyons en enfer, ahah ! Welcome ! La musique comble le peu de dialogue entre les protagonistes. Je dirais plutôt que la musique est centrale et les dialogues restent secondaires, comme une musique instrumentale avec un chant par intermittence (ce qui n'est plus une musique instrumentale mais bon...). Ce côté sombre fait penser à toute la musique des années 80, entre Dépêche Mode et Cure, leA girl walks home alone at night - un film d'Ana Lily Amirpour (2014) Gothic, la musique électronique, la new-wave qui mettaient en valeur quelque chose de différent et en rien de joyeux.

    Tant j'ai adoré l'esthétisme, la photographie, la représentation de la musique, les deux acteurs principaux, tant j'ai eu par moment du mal à suivre, sentant des longueurs par-ci, par-là, comme une envie pressante de faire accélérer quelques scènes. Le côté vampire aurait pu être mieux exploité en mettant une ou deux scènes supplémentaires un peu plus consistante et effrayante pour garder un certain rythme, Ana Lily Amirpour ayant préféré jouer sur l'imagerie du vampire plutôt que sur l'épouvante, la peur (hormis une scène). Du très bon (esthétisme), et du moins bon (longueur, ennui) pour un film qui vaut tout de même le déplacement pour les raisons déjà évoquées.

    Interview d'Ana Lily Amirpour

    Avec Sheila Vand, Arash Marandi, Dominic Rains, Marshall Manesh, Mozhan Marnò, Reza Sixo Safai, Milad Eghbali, Rome Shadanloo, etc.

    A girl walks home alone at night - un film d'Ana Lily Amirpour (2014) 

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  • Sortie en salle le 4 février 2015

    Kertu - un film de Ilmar Raag (2013)Kertu est un film estonien réalisé par Ilmar Raag. L'Estonie est un petit pays de 1.372.000 habitant-e-s avec une superficie plus ou moins équivalente à celle des Pays Bas. Il est situé au Nord de l'Europe, en-dessous de la Finlande (séparé par la mer), à l'est se situe la Russie et au sud la Lettonie. Il fait parti des Pays Baltes avec la Lituanie et la Lettonie. Sa capitale est Tallinn. Depuis 1991 l'Estonie a obtenu son indépendance depuis la fin de l'U.R.S.S. Un peu de géographie pour ce pays dont on ne parle quasiment jamais hormis pour des destinations touristiques.

    En 2013, année de sa sortie en Estonie, "Kertu" est le film qui obtenu le plus d'entrées, dépassant des films comme "Gravity". Son prix obtenu au festival de Cabourg lui a permis de trouver un distributeur français qui le diffusera notamment dans quelques cinémas parisiens d'arts et d'essais.

    Kertu est une femme de 30 ans qui vit chez ses parents dans un village sur l'île estonienne de Saaremaa. Son père est violent et autoritaire, sa mère soumise. Elle est très timide et a peur des personnes qu'elle rencontre. Ses parents et tout le village pensent qu'elle a un fond de débilité. Elle travaille à la Poste et distribue le courrier à pied. Elle est secrètement amoureuse de Villu, un alcoolique qui court après les femmes. Tout va changer dans leur vie le jour où Kertu envoie une déclaration sous forme de poème à Villu. Ce dernier va apprendre à connaître Kertu, en ne la voyant pas comme une simple d'esprit mais comme une femme qui a besoin de se sentir en confiance pourKertu - un film de Ilmar Raag (2013) s'exprimer, chose qu'elle ne rencontre jamais dans le cercle familial qui ne lui permet pas de s'extérioriser, ni de s'exprimer, ni de prendre des initiatives. Au contraire, son père violent l'humilie (ainsi que sa femme) et l'a fait passer pour une demeurée. Après une nuit passée ensemble les parents de Kertu et tout le village pense que Villu a abusé d'elle. Il a désormais tout le monde à dos hormis sa mère qui le soutient. En parallèle, Villu apprend qu'il a un cancer à la gorge et que s'il continue à boire et à fumer, sa vie s'arrêtera dans moins d'un an.

    Dans ce film Ilmar Raag nous mène dans une histoire d'amour atypique entre un homme alcoolique qui se détruit et une femme qui souffre d'un complexe d'infériorité à cause d'un père violent et ultra dominant. Les prises de position des gens du village qui vivent par les "on dit" et les à priori sans analyser en profondeur, préfèrent exclure Villu plutôt que de remettre en question le patriarche (père de Kertu). Kertu, timide, très timide, souffrant de peur, la peur des autres, se met à parler, à rire au contacte de Villu. Il lui aura fallu attendre 30 ans pour que quelqu'un la considère juste pour ce qu'elle est : une femme à l'écoute, qui veut être écoutée, s'épanouir, échanger qui veut aimer et être aimée... et non le personnage dans lequel son père l'a confinée. Sa famille ne comprend pas que sa timidité maladive provient du fait qu'elle a été "maternée" à outrance et humiliée. Avec Kertu, Villu comprendra qu'il est temps de se battre pour rester en vie et que la vie peut aussi être belle.

    Kertu - un film de Ilmar Raag (2013)

    La photographie sur l'île de Saaremaa est belle, mettant en avant des paysages somptueux et avec une esthétique appropriée. Le film est à rebondissement même s'il ne s'agit aucunement d'un film d'action ou d'un thriller. A aucun moment je ne me suis ennuyée, avec des enchaînements bien menés malgré certaines longueurs (justifiées). Le film joue beaucoup sur les relations entre personnes (Kertu et son père, Kertu et sa mère , Kertu et Villu, Villu et sa mère) et de forts moments en émotion apparaissent notamment la scène à l'hôpital et l'après hôpital, le final, la rencontre entre Kertu et Villu, la violence du père avec sa fille et sa femme...). Une histoire qui a permis à deux êtres de se reconstruire et d'essayer de sortir de leurs problèmes mais aussi un final inattendu qui permet de constater que finalement les plus malheureux ne sont pas forcément ceux que l'on croit.

    Ursula Ratasepp dans un rôle très difficile joue magnifiquement Kertu apeurée, isolée, maltraitée avec son regard triste, baissant la tête et avec un changement radical au côté de Villu : elle se met à sourire, à rire, un physique qui se métamorphose pour créer une Kertu joyeuse et heureuse. Dans le rôle de l'alcoolique Mait Malmsten s'en sort très bien, il se métamorphosera également, d'une autre façon mais il changera pour vivre, soutenir et rejoindre celle qu'il aime. La qualité et le succès du film est en parti grâce aux acteurs et actrices qui joue avec  grande conviction.

    "Kertu" est une bonne surprise, le genre de film de qualité à petit budget à soutenir inconditionnellement. :-)

    Avec Ursula Ratasepp, Mait Malmsten, Külliki Saldre, Leila Säälik, Peeter Tammearu, Jüri Lumiste, etc.

    Kertu - un film de Ilmar Raag (2013)

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