Beyrouth l'été. Une nuit de la vie d'un jeune libanais, Toufic, et ses déambulations nocturnes. Entre sa famille, ses amis et ses amours, il essaie de croquer la vie à pleines dents, s'amuser, aimer, et chaque seconde qui passe est vitale... Mais il découvre que vivre normalement, dans ce pays, est un luxe hors de sa portée. Quinze ans après la fin de la guerre, il y a toujours un volcan qui sommeille à chaque coin de rue, une nappe de gaz prête à exploser.

Premier long métrage du réalisateur libanais Michel Kammoun qui signe une comédie avec un petit côté dramatique. Toufic est coursier en scooter. Le soir venu, il va chez un ami qui organise une fête. Une soirée qui aurait dû être réussie puisqu'il y retrouve des ami-e-s et sa petite amie Jasmine mais des événements vont troubler le bon déroulement. Dans la rue un homme va donner un coup au visage de Toufic. Ce dernier va être blessé dans sa chair de cette violence malgré le réconfort de ses ami-e-s. Il va se mettre en tête d'acheter un révolver pour se venger. Michel Kammoun explique que ce garçon voudrait vivre, aimer, s'amuser comme tous les jeunes de son âge. Et à un moment donné, il ne supporte plus d'être victime d'une injustice. Il n'en peut plus d'être humilié. Toufic est un homme blessé, on le voit à un moment s'isoler et pleurer. Ce thème de l'humiliation est très présent dans cette partie du monde. Dans la scène où Toufic se regarde dans la glace, je pense que le film dépasse le propre sort de Toufic pour parler d'un peuple humilié. Ce sentiment de frustration et d'impuissance est insupportable et malheureusement, la vengeance est un instinct de base qui peut nous faire réagir comme il y a trois mille ans ! J'ai vu des gens prêts à perdre leur vie parcequ'ils ne parvenaient plus à accepter de subir une humiliation constante. L'être humain a besoin d'un minimum vital de dignité. L'homme d'âge mur qui a agressé Toufic roulait en BMW avec une jeune femme comme passagère. Dans son attitude, l'homme dénotait un machisme déconcertant, voulant à tout prix trouver un coupable à une éraflure sur sa voiture. Le film monte à crescendo mais l'humour y est très présent, notamment avec son copain Aboudi, le Pierre Richard libanais, les soeurs Sophia et Lorraine ou la séquence à la télévision dans laquelle des astronautes sont écrasés par des falafels géants. Humour, quand tu nous tiens ! "Falafel" est rempli de tendresse, entre Toufic et Jasmine mais aussi entre Toufic et son petit frère qui permet au personnage principal de relativiser les problèmes rencontrés lors de la soirée.

Un film soigné, gentil qui permet de passer un bon moment même s'il ne restera pas longtemps dans mon esprit : je ne suis pas fan mais alors vraiment pas fan de comédie mais "Falafel" tient bien la route et Michel Kammoun signe un premier long métrage sympathique.

Le réalisateur souligne dans une interview les difficultés de réaliser des films au Liban : les conditions de tournage sont toujours difficiles, avec un maximum de deux ou trois films produits par an, il n'y a pas d'industrie du cinéma au Liban, toutes les infrastructures sont à réinventer pour chaque projet. Faire un film au Liban, ce n'est pas seulement fabriquer un train, c'est aussi monter les rails ! Raison de plus pour soutenir ce film et par extension de soutenir des films de qualité produits et réalisés dans des pays en guerre, ayant peu de moyens, où la censure est présente, etc. La production cinématographique ne s'arrête pas aux Etats-Unis, à la France, au Japon, à l'Inde ou à l'Angleterre ! Si, si, c'est vrai.

Avec Elie Mitri, Gabrielle Bou Rached, Michel Hourani, Issam Bou Khaled, etc.

Bande-annonce :