• Article publié le 18 avril 2016 sur mon blog Un vent de liberté

    Demain - un film-documentaire de Mélanie Laurent et Cyril Dion (2015)A l'occasion d'une projection destinée au personnel de la ville de Paris (Merci Claire !) suivie d'un débat avec le co-réalisateur Cyril Dion et la monteuse images Sandie Bompar, j'ai  assisté pour la seconde fois à "Demain".  Ce film est LE documentaire de l'année, avec presqu'un million d'entrées et un césar en poche. Il est à l'affiche depuis 20 semaines et va être diffusé dans 30 pays. Il faut dire qu'avec la COP21, il est vraiment sorti au bon moment. Que dire de plus hormis que "Demain" est excellent ? Il donne beaucoup de pistes de réflexion - grâce à des méthodes mises en pratique localement - pour faire évoluer la société de façon écologique et plus égalitaire.

    Mélanie Laurent, Cyril Dion et l'équipe du tournage ont parcouru plusieurs pays afin d'aller à la rencontre d'alternatives face au désastre écologique. Quelques exemples : Détroit aux Etats-Unis a perdu 1 quart de sa population à cause de la fermeture de l'industrie automobile. Les plus pauvres ont été contraints de rester et se sont organisés afin de créer des fermes et jardins bio en ville et dans la périphérie. Aux Etats-Unis en moyenne un produit parcourt 2.400 kilomètres entre le lieu de production et Demain - un film-documentaire de Mélanie Laurent et Cyril Dion (2015)d'achat. A Détroit, les fruits, les légumes sont locaux et bio, évitant ainsi le pétrole, les pesticides et en permettant de créer de nombreux emplois. Dans une ville d'Angleterre, des personnes font pousser des légumes un peu partout, là où il y a de la place et tout le monde en redemande. En France, c'est au tour d'une expérience d'une production familiale de fruits et légumes en permaculture, sans tracteur, sans pétrole. La petite exploitation fonctionne bien et a nettement moins besoin d'espace que les cultures uniques. La permaculture est l'avenir. On nous explique que les gouvernements s'associent avec les multinationales (ce n'est pas un scoop !), la plupart liées à l'économie du pétrole. On comprend pourquoi le tout pétrole est omniprésent, partout dans le monde.

    Demain - un film-documentaire de Mélanie Laurent et Cyril Dion (2015)

    Il est possible de créer de l'énergie grâce à l'eau (géothermie), au soleil (panneaux solaires), au vent (éoliennes). En Islande, la création d'éoliennes permet de fournir suffisamment d'électricité pour tout le pays et d'en fournir au Danemark.  A La Réunion, 35 % des énergies sont renouvelables. A Copenhague, 67 % des habitant-e-s n'utilisent pas de voitures, préférant la pratique du vélo (de nombreux aménagements ont été créés), de la marche à pied, des transports en commun. A San Francisco aux Etats-Unis, on parle de zéro déchet. 80 % des déchets sont recyclés dans la ville. Le composte est vendu aux fermier-e-s. Rien ne se perd, tout se recycle. A Lille, en France, une entreprise de production d'enveloppes grossit sont chiffre d'affaire d'année en année. Tout est pensé de façon écologique, aussi bien les locaux, que le matériel utilisé. L'écart de salaire est de 1 à 4. On parle aussi du cas de l'Islande qui a réussi, suite à la contestation du peuple, à proposer une nouvelle constitution et à mettre en place un système plus démocratique avec notamment le tirage au sort des représentant-e-s. En Inde, un maire a réussi à faire vivre ensemble et de bonne manière les intouchables avec d'autres castes pauvres. En Finlande, l'école existe pour l'épanouissement de chaque enfant. Il n'est plus question d'évaluation, de punition, mais de confiance, d'épanouissement. Dans les classes on trouve 2 enseignant-e-s pour 15 élèves. Les enseignant-e-s utilisent plusieurs méthodes d'apprentissage car chaque individu est différent. On ne parle plus d'enfants qui doivent s'adapter mais d'adultes qui s'adaptent en fonction de la personnalité des jeunes. Il est aussi question de monnaies locales, de villes en transition et d'autres points ô combien intéressants.

    A titre d'exemple, La SNCF a installé dans les métros 1 million d'écrans publicitaires. Un seul panneau utilise autant d'électricité que la consommation de deux familles. Les entreprises font-elles semblant de ne rien comprendre ?

    Demain - un film-documentaire de Mélanie Laurent et Cyril Dion (2015)

    Ce qu'il nous reste à faire ? Moins consommer au quotidien (60 à 65 % de la consommation pourrait être évitée), cela veut dire être moins accro à la voiture, recycler ses déchets, manger moins (et pas du tout serait encore mieux pour la planète et la santé des animaux) de viande, d’œufs, de lait, acheter local et dans des petits commerces, changer de fournisseur d'électricité (comme Enercoop. ERDF = nucléaire), s'organiser à plusieurs pour créer des jardins partagés, des ateliers de réparation de vélo, des échanges de savoir, des assemblés de quartier pour que la véritable démocratie prenne place, loin de l'oligarchie actuelle dans laquelle les politiciens hauts placés et multinationales marchent main dans la main. Il existe tant de choses à faire, seul-e et en groupe. Arrêtons de penser qu'être heureux et heureuse signifie consommer, posséder.

    Un film qui donne des pistes et aussi de l'espoir. Pour un changement dès maintenant, pour que l'apathie disparaisse et les alternatives à cette société de surproduction se multiplient.  

    "Demain" est bien mené, toujours intéressant, captivant. Je ne suis pas toujours d'accord avec tout ce qui est dit mais l'essentiel est cette volonté de faire (ré)agir les spectateurs et les spectatrices. Chacun-e peut apporter sa part du colibri. Maintenant et demain. Pour que l'utopie se réalise. :-)

    Plus d'informations :  http://www.demain-lefilm.com 

    Demain - un film-documentaire de Mélanie Laurent et Cyril Dion (2015)

    Cyril Dion et Sandie Bompar

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  • Sortie en salles le 1er novembre 2017

    TLes conquérantes - un film de Petra Biondina Volpe (2017)rois ans se sont écoulés depuis mai 68 mais la vague de libération ne semble pas avoir atteint le petit village suisse d’Appenzell. En mère au foyer exemplaire, Nora ne conçoit d’ailleurs pas sa vie autrement. Pourtant, à l’approche d'un référendum sur le droit de vote des femmes, un doute l'assaille : et si elles s'affirmaient davantage face aux hommes ? A mesure que Nora propage ses drôles d'idées, un désir de changement s'empare du village, jusque chez les plus récalcitrantes…

    1971 est l'année durant laquelle les femmes Suisses ont obtenu le droit de vote. Petra Biondina Volpe s'est penchée sur cette avancée historique (et tardif) pour réaliser un film centré sur un village fictif, situé dans les montagnes suisses. Le personnage principal, Nora, vit dans ce village. Sa vie se résume à sa famille et aux taches ménagères. En rencontrant par hasard des militantes féministes donnant de l'information sur le référendum pour ou contre le droit de vote aux femmes, elle va s'engager dans son village pour que les "non" deviennent des "oui" et permettre ainsi que les mentalités évoluent. Elle est aidée par un petit groupe de femmes qui va s'agrandir au fur et à mesure et  va devoir faire face aux hommes récalcitrant qui souhaitent garder leurs privilèges sous prétexte d'arguments religieux et essentialistes.

    "Les conquérantes" met l'accent sur les inégalités entre les hommes et les femmes, ces dernières étant soumises à leur mari et avec des droits très restrictifs. Malgré la tragédie de la situation,  la réalisatrice (également scénariste) a préféré orienter le film sur la solidarité entre femmes, sur l'humour plutôt que sur l'aspect dramatique (la photo de l'affiche du film l'annonce clairement). Il se rapproche dans la forme plus à "We want sex equality" qu'à "Les suffragettes" (droit de votes des anglaises obtenu en 1918 et pour les françaises en 1944). 

    Les conquérantes - un film de Petra Biondina Volpe (2017)

    On suit le parcours courageux de Nora, au début la seule personne de son village à affirmer ses idées d'émancipation et d'égalité, en commençant par le droit de vote. Son courage et sa détermination amènera d'autres femmes à la suivre et à se rebeller face aux hommes dominants et contre le patriarcat. C'est bien sûr le genre de films rageant et en même temps qui donne des ailes lorsque les dominées brisent (partiellement) leurs chaines.

    On est loin des films historiques à grand budget qui font palpiter le cœur (ou pas). Toutefois "Les conquérantes" est bien réalisé, avec de petits moyens et s'en sort plutôt bien. J'apprécie tout particulièrement les films traitant de sujets politiques et sociales. Gardons à l'esprit que le cinéma est un bon moyen de réflexion. Ce film est toujours malheureusement d'actualité car même si le droit de vote des femmes existe dans la plupart des pays, les inégalités persistent et les femmes doivent toujours se battre pour se faire entendre et réclamer une égalité réelle. 

    Je conclus avec des propos de Petra Biondina Volpe : "Le droit de vote des femmes est un des chapitres les plus sombres de l’Histoire suisse. Bien sûr, tout le monde sait, mais personne, ni à l’école ni en société, n’en parle vraiment, ce qui arrive très souvent dans l’histoire des femmes, toujours mises de côté. J’ai voulu rendre hommage à ces femmes qui ont lutté avec ardeur pendant plus de 100 ans pour obtenir le droit de vote et décrire cette oppression dans laquelle elles vivaient, jour après jour. Le message que je fais passer, par la même occasion, est qu’il faut continuer à faire preuve de courage civique et à lutter pour l’égalité."

    Les conquérantes - un film de Petra Biondina Volpe (2017)

    Avec : Marie Leuenberger, Bettina Stucky, Ella Rumpf, Sofia Helin, Maximilian Simonischek, Rachel Braunschweig, Sibylle Brunner, Peter Freiburghaus, Marta Zoffoli, Nicholas Ofczarek, Noe Krejcí, Finn Sutter, Elias Arens, Mirjam Zbinden, etc.

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  • Sortie en salles le 1er novembre 2017

    Jeune femme - un film de Léonor Serraille (2017)Un chat sous le bras, des portes closes, rien dans les poches, voici Paula, de retour à Paris après une longue absence. Au fil des rencontres, la jeune femme est bien décidé à prendre un nouveau départ. Avec panache

    Le film entre rapidement dans le vif du sujet et ce, dès les premiers instants. Paula entre en action, avec fracas et une envie de tout claquer et plaquer. Les bases sont données. Paula, c'est la jeune femme du titre du film qui vient d'être larguée par son compagnon après dix années de vie commune passées en Amérique du Sud. Elle est à la rue, sans travail, sans soutien et avec une adorable chatte comme amie.  La situation la rend très vulnérable et son mal-être se transforme en tornade. Une tornade qui tape sur les murs, crie, répond du tac au tac. Paula va apprendre au fil de rencontres à se poser un peu, à se calmer aussi, à prendre des décisions.

    Le film se déroule à Paris. Un Paris souvent en extérieur filmé de belle manière dans différents quartiers, dans les rues, les parcs, le métro. On sent un certain sens de l'esthétique, par exemple dans la scène qui se déroule en boite de nuit, en enchaînant sur une ballade de nuit collective de rollers. Paula et sa mère assises sur un canapé avec en fond le mur : on pourrait aisément imaginer la scène comme un tableau.  La place de la caméra, la manière de suivre les protagonistes, rien n'est laissé au hasard. 

    Jeune femme - un film de Léonor Serraille (2017)

    Jeune femme, c'est avant tout Laetitia Dosch (La belle saison, La bataille de Solférino, Keeper, Mon roi, Les malheurs de Sophie... également danseuse, comédienne et metteure en scène  de théâtre) dans le rôle de Paula qui joue une interprétation brillante. Entre colère, violence, extra-extra-extraversion et aussi une certaine forme de tendresse qui montre que toute cette colère en elle est liée à une avalanche de problèmes qu'elle résoudra palier par palier. Les seconds rôles sont également mis en valeur et bien développés, avec Ousmane (Souleymane Seye Ndiaye), ce vigile qui passe ses journées de travail à penser pour éviter l'ennui et qui aidera Paula dans sa reconstruction, la mère de Paula (Nathalie Richard, déjà dans le rôle principal du moyen-métrage "Body" de la réalisatrice) qui ne pardonne rien, Joachim (Grégoire Monsaingeon), son ex-compagnon ou son amie Yuki (Léonie Simaga). Le film joue et met un fort accent sur les personnages, tout en ayant une intrigue cohérente et bien menée. Une esthétique, une photographie (l'image de Paula sur un pont, regardant la Seine... bravo !) qui valent le détour. C'est aussi de l'humour bien pesé, bien pensé, sans trop en faire (on ne tombe pas dans le comique pour faire du comique).

    C'est une histoire simple, touchante de sincérité qui rappelle toute la difficulté de s'adapter dans une nouvelle ville (ou après une longue absence) surtout si elle est grande. La difficulté de remonter la pente lorsque le moral est au plus bas. Toutes les "mauvaises" choses dites et faites sous le coup de la colère car finalement nous ne sommes que des êtres humains doués de sensibilité qui par moment nous joue de bien mauvais tours. Tout n'est pas noir, tout n'est pas blanc et il est nécessaire d'analyser la situation pour comprendre ou tout du moins d'essayer de comprendre les autres et nous-mêmes par la même occasion. La difficulté enfin et pour finir de vivre dans une ville comme Paris lorsque l'on n'est pas fortuné-e, avec le prix élevé des loyers, des emplois précaires (comme partout, malheureusement) et mal payés. La scène de l'entretien d'embauche (partiellement sur la bande annonce) est excellente. Il est nécessaire de se vendre, de mentir, de se plier pour avoir une chance d'être retenu-e pour un boulot minable.

    Jeune femme - un film de Léonor Serraille (2017)

    Léonor Serraille réalise (et écrit) avec "Jeune femme" son premier long métrage. Au festival de  Cannes 2017, il a remporté la caméra d'or (prix pour un premier film). Il a également été présenté dans la sélection Un certain regard. Il a également remporté un prix au Champs-Elysées Film Festival.  L'équipe du film est majoritairement composé de femmes, ce qui intrigue de nombreuses personnes. La réalisatrice a souhaité travailler avec des personnes compétentes avec lesquelles elle avait déjà collaboré pour son moyen-métrage "Body" et au final la plupart étaient des femmes. Rien de prémédité. Serait-on intrigué si la majorité était des hommes, comme on le retrouve à 99,98 % dans le monde du cinéma ? C'est une très bonne chose que le nombre de cinéastes femmes augmente et que les rôles des actrices évoluent (même si les stéréotypes persistent). Peut-être qu'un jour plus personne ne se préoccupera du genre des personnes. Un jour peut-être, en plein post apocalypse lorsque les zombies nous poursuivront pour nous manger. Le genre n'aura plus trop d'importance ! :-)

    "Jeune femme" fait parti du top 10 de mes films préférés de l'année, je vous recommande d'aller le voir si ce n'est pas déjà fait.

     

    Avec : Laetitia Dosch, Grégoire Monsaingeon, Léonie Simaga, Souleymane Seye Ndiaye, Nathalie Richard, Erika Sainte, Lilas-Rose Gilberti-Poisot, Audrey Bonnet, etc.

    Jeune femme - un film de Léonor Serraille (2017)

    Bande annonce :

    Interview de Léonor Serraille (scénariste et réalisatrice) Laëtitia Dosch (Paula), Souleymane Seye Ndiaye (Ousmane) et Erika Sainte (la mère de la petite fille) :


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  • Sortie en salle le 18 octobre 2017

    Tous les rêves du monde - un film de Laurence Ferreira Barbosa (2017)Pamela, la petite vingtaine, est dans une mauvaise période : elle échoue pour la seconde fois au bas S et rate l'examen du permis B. Malgré les encouragements de ses parents qu'elle aime profondément, elle ne sait pas vers quelle(s) direction(s) mener sa vie. Comme chaque été, elle part en vacances avec ses parents, sa sœur et son neveu dans un village portugais dont la famille est originaire. Elle idéalise le village et la vie au Portugal jusqu'à ces vacances qui seront l'amorce d'un nouveau départ. 

    Le film trace le portrait de Pamela, une jeune femme à la personnalité forte qui se cherche. Née en France, d'origine portugaise, vivant en région parisienne, sa vie se partage entre le lycée, sa famille, le piano, le patinage artistique, son association culturelle portugaise. Face à des échecs consécutifs, elle se met des obstacles psychologiques qui l'empêchent de penser sereinement et de prendre sa vie en main. "Tous les rêves du monde" traite du doute , de la difficulté d'évoluer entre (ou avec) deux cultures, deux pays, entre idéalisme et rejet ou comment s'accepter lorsque l'on est jeune sans décevoir ses parents.

    La plupart des acteurs et actrices principaux sont volontairement des non professionnels. Pamela Constantino Ramos dans le rôle de Pamela n'y fait pas exception. Elle est carrément géniale, un style atypique, une personnalité et un jeu qui détonne. Lors des premières minutes du film, on voit Pamela, allongée sur son lit, en train de regarder un film avec un chat sur ses genoux et une affiche d'un film de Wes Craven sur le mur de sa chambre. On ne pouvait pas mieux commencer ! :-) Les images de montagnes (Portugal) sont magnifiques, inoubliables. Le film est soigné, simple, sans artifice. Une certaine simplicité, non dénuée d'humour et surtout d'intérêt (!) fait de ce film un bon moyen pour passer un agréable moment pendant un peu moins de deux heures. C'est le le premier film de Laurence Ferreira Barbosa que je regarde. Elle n'en est pourtant pas à son premier coup d'essai puisqu'elle a réalisé quelques longs métrages comme "Les gens normaux n'ont rien d'exceptionnel", "J'ai horreur de l'amour" ou "Soit je meurs, soit je vais mieux". Elle a également co-écrit le film. 

    Tous les rêves du monde - un film de Laurence Ferreira Barbosa (2017)

    Avec : Pamela Constantino Ramos, Rosa Da Costa, Antonio Torres Lima, Mélanie Pereira, David Murgia, Lola Vieira, Alexandre Prince, etc.

     

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  • Sortie en salle le 18 octobre 2017

    La belle et la bête - un film de Kaouther Ben Hania (2017)Tunis. Mariam, 21 ans, rencontre Youssef lors d'une fête étudiante. Un peu plus tard dans la soirée, elle est agressée sexuellement par trois policiers. D'abord avec Youssef, puis toute seule, Mariam va lutter jusque dans ses derniers retranchements pour pouvoir porter plainte contre ses agresseurs.

    Le film est une adaptation libre du livre autobiographique "Coupable d'avoir été violée" de Meriem Ben Mohamed. Nous suivons le calvaire de la protagoniste qui essaie coûte que coûte de se faire entendre afin de pouvoir déposer une plainte au commissariat. Son chemin est semé d'embûches. Comme il arrive bien trop souvent lors de viols, les victimes deviennent aux yeux des "autres" les coupables, leurs paroles étant bien trop remises en question dans les sociétés patriarcales dans lesquelles nous vivons. Mariam subira dans le commissariat l'intimidation, la violence et luttera jusqu'au bout pour se faire entendre. Sa ténacité, son envie de justice l'amène à surpasser ses peurs.  

    L'action se déroule en pleine post révolution. Youssef en a été l'un des partisans et veut que justice soit faite à Mariam. Il l'encourage pour que ses droits soient respectés. Mais Mariam n'est pas une suiveuse, elle luttera pour elle. Youssef n'aura été que l'élément déclencheur. Même si Mariam se retrouve seule face aux policiers, agresseurs pour certains, complices ou indifférents pour d'autres, elle a un soutien dans le commissariat ce qui évite de faire tomber le film dans un manichéisme primaire et il donne ainsi une certaine touche d'espoir.

    La belle et la bête - un film de Kaouther Ben Hania (2017)

    Les scènes sont filmées caméra au poing, dans des plans séquences ce qui donne une volonté de continuité dans les interactions, dans les mouvements, dans l'action. La réalisatrice Kaouther Ben Hania qui signe son troisième long métrage, n'a pas souhaité filmer la scène de viol. Cette décision me parait intelligente car elle évite un surplus d'émotion dans ce film déjà bien intense, pas besoin d'en rajouter et encore moins de faire l'étalage du traumatisme subi par Mariam. Cela appuie l'idée qu'un viol est une atrocité, pas besoin d'images chocs pour avoir de la compassion et de soutenir les victimes. Elles doivent l'être, point barre.

    "La belle est la meute" est une belle réussite malgré quelques imperfections. Un film politique qui amène les spectatrices et spectateurs à se questionner quant aux inégalités liés au genre, aux abus de pouvoir, à la violence d'Etat et de ses représentants. Lorsqu'un film donne des pistes de réflexion, c'est déjà un film intéressant. La culture, les arts sont pour moi un bon moyen pour mettre en lumière d'une façon subtile ou pas, une réflexion, un débat, un contexte qui est par essence politique. Un film engagé et féministe très fort en intensité et à soutenir. Lors du dernier festival de Cannes il a été présenté dans la section Un Certain Regard (film atypique ou réalisateur/réalisatrice peu connu)

    Mention spéciale à Mariam Al Ferjani (petit interview en vidéo, voir un peu plus bas) qui fait une excellente interprétation dans un rôle polyvalent et difficile à jouer. Elle a déjà joué dans un court-métrage de Leyla Bouzid (la réalisatrice du réussi long métrage "A peine j'ouvre les yeux" sorti en 2015).

    Avec : Mariam Al Ferjani, Ghanem Zrelli, Noomane Hamda, Mohamed Akkari, Chedly Arfaoui, Anissa Daoud, Mourad Gharsalli, etc.

    La belle et la bête - un film de Kaouther Ben Hania (2017)

     

    Interview de la comédienne Mariam Al Ferjani :

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